Alors qu’il est question de d’engager de nouvelles campagnes sismiques en Méditerrannée, il est utile de savoir que les charges sonores dégagées à cette occasion sont si puissantes qu’elles peuvent tuer un cétacé à proximité. Elles sont ressenties à 1000 km.
Lors de la phase de prospection sismique, des canons à air comprimé envoient des décharges sonores très puissantes -250 décibels- qui peuvent pénétrer jusqu’à 20 km sous terre. L’analyse de l’écho permet de définir la nature du sol et la présence éventuelle d’hydrocarbures.
La puissance de ces décharges est «suffisante pour tuer un cétacé à proximité, endommager son sonar s’il est situé dans un rayon de 20 kilomètres et impacter les pêches sur des distances considérables» explique Denis Lieppe, conseiller scientifique au parc national de Port-Cros, ces déflagrations pouvant être ressenties à plus de 1 000 km…
Selon la communauté scientifique, ces ondes émises «perturbent non seulement l’ouïe des cétacés, mais aussi leurs communications extrêmement sophistiquées et importantes pour leur survie tout comme leur système d’écholocalisation, sixième sens leur permettant de se nourrir et de se diriger» fait remarquer Pierre Henri Weber de l’association Corsica mare osservazione.
Le périmètre du permis Rhône-Méditerranée retenu pour effectuer des sondages couvre la quasi-totalité d’un site qui accueille en période estivale la grande majorité des grands cétacés de Méditerranée. Plusieurs outils de protections sont pourtant à l’œuvre en Méditerranée afin de protéger les mammifères marins. Il s’agit notamment de la zone de protection écologique (carte ci-dessous) et du sanctuaire Pélagos.
Délimitation (en bleu) de la zone de prospection écologique en Méditerranée
Des protections pour les mammifères marins
Zone de protection écologique. Afin d’assurer une meilleure protection de la façade méditerranéenne, la Zone française de protection écologique (ZPE) est devenue réalité en 2004. Sa délimitation a été effectuée en concertation avec l’Espagne, l’Italie, Monaco et l’Algérie. Elle permet en France de poursuivre les infractions liées à la pollution des eaux marines au-delà des eaux territoriales (12 milles) et jusqu’à 60 milles, conformément à la convention Marpol.
Selon un récent rapport parlementaire, la mise en place du dispositif français a abouti à une diminution de 70 % des infractions dans le périmètre établi. En observant la carte localisant l’importance des rejets illicites d’hydrocarbures, on regrette qu’il existe une forte densité de rejets dans une partie du sanctuaire Pelagos et à l’est de la Corse ou le cabotage des navires est peu surveillé par les autorités italiennes. L’amélioration de la situation de la ZPE française ne doit pas masquer la réalité : le dispositif n’aura pas atteint ses objectifs tant qu’il ne sera pas mis en œuvre par les États riverains qui s’y sont engagés. On a pu constater, suite au durcissement du dispositif français, un déport des rejets illicites vers des secteurs où les réseaux de surveillance étaient moins actifs.
Le sanctuaire Pelagos. Cet espace maritime de 87 500 km² fait l’objet d’un accord signé en 1992 entre l’Italie, Monaco et la France pour la protection des mammifères marins qui le fréquentent. On dénombre environ 25 000 dauphins bleus et blancs et un millier de rorquals communs en période estivale.
Le Sanctuaire Pelagos est également un espace dédié à la concertation, pour que les activités
humaines déjà présentes puissent s’y développer en harmonie avec le milieu naturel sans compromettre la survie des espèces et la qualité de leurs habitats.
Le sanctuaire est classé en aire spécialement protégée d’importance méditerranéenne (Aspim).
Parmi les diverses actions entreprises (à l’initiative de l’association Souffleur d’écume) : le projet Recept. Des navires volontaires (c’est le cas de CMN), embarquent un système informatique et positionnent les grands cétacés qu’ils rencontrent afin d’informer les autres navires participant au réseau des risques de collision
Localisation et densité des rejets illicites d’hydrocarbures en Méditerranée occidentale (2004). Plus la couleur est sombre, plus les rejets sont importants. La partie italienne du sanctuaire Pelagos, le nord et l’est de la Corse sont fortement exposés.