Le site de Ghjuncaghju ne semble pas le meilleur pour un centre d’enfouissement de déchets et l’un des promoteurs n’offre pas les meilleures garanties d’une exploitation correcte.
En général
– La démarche Zeru Frazu (tri à la source et 20% de résiduel à enfouir) mise en oeuvre rapidement suffirait à rendre un nouveau centre inutile.
– Un centre d’enfouissement, s’il reçoit des biodéchets et des déchets dangereux (solvants, piles, etc.) produit des polluants gazeux (dont les molécules responsables des odeurs) et liquides. Le coût de l’enfouissement (outre les bénéfices confortables des exploitants) vient des dispositifs mis en place (réseaux de captage du biogaz et des lixiviats, torchères, bassin de rétention, etc.) pour limiter la pollution. Même avec les dispositifs anti-pollution, gaz et odeurs s’échappent et les lixiviats finissent par passer –plus ou moins rapidement– les barrières d’étanchéité.
A terme les centres d’enfouissement ne doivent recevoir que des déchets inertes et vraiment non dangereux.
– En ce qui concerne l’éloignement des sites d’enfouissement des gros “gisements” de déchets, ce n’est pas l’unique paramètre à considérer: il faut que le site soit géologiquement favorable et éloigné de zones d’habitation et de cours d’eau. Plus le tri des biodéchets et des déchets dangereux sera important, moins les contraintes de localisation des sites d’enfouissement seront importantes.
Sur le projet de Ghjuncaghju plus particulièrement
– Le projet est inclus dans la zone Natura 2000 de la basse vallée du Tavignani. Les travaux de terrassement liés à la mise en place des casiers impacteront forcément le site Natura 2000. Quant aux lixiviats (jus de drainage des couches de déchets) qui théoriquement ne devraient pas sortir des casiers, mais qui en fait s’échappent à plus ou moins long terme, ils sont un risque chimique pour le fleuve.
Localisation du projet du centre d’enfouissement dans la boucle du Tavignani (source dépliant des promoteurs)
– La proximité du Tavignani est un réel problème pour les questions citées plus haut, indépendamment du classement de la zone en Natura 2000.
Il faudrait lister les usages de l’eau en aval pour évaluer les impacts négatifs (captages pour l’eau potable, irrigation, baignades à l’embouchure). Il est à craindre aussi qu’avec le phénomène de brises thermiques dans la vallée, la question des odeurs touche une population beaucoup plus importante que le périmètre proche du site.
– L’adéquation de la géologie du site avec l’implantation d’un centre d’enfouissement reste à évaluer.
– Le peu de respect de la législation environnementale par l’un des promoteurs du centre d’enfouissement laisse à craindre une conduite hasardeuse de l’exploitation. En effet M. Pierre Pifferini et la SARL Agrégats Béton Corse ont déjà fait l’objet de 4 condamnations pour infraction à la réglementation environnementale en juin et octobre 2011, en avril et juillet 2013 ! L’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) avait dressé un inventaire édifiant des écarts de P. Pifferini par rapport à la réglementation environnementale, avec pas moins de 8 procédures entre 2002 et 2011 ! P. Pifferini est un multirécidiviste… Lors de l’audience du tribunal correctionnel de novembre 2015, suite à la constatation de nouvelles infractions et étant donné leurs gravités, le Procureur a demandé, entre autres, l’interdiction de toute activité professionnelle pendant 5 ans… Le jugement est attendu pour le 27 janvier.
En conclusion, le site de Ghjuncaghju ne semble pas le meilleur pour un centre d’enfouissement de déchets (en tout cas tant que l’enfouissement ne concernera pas qu’une fraction vraiment résiduelle et inoffensive des déchets) et l’un des 3 promoteurs n’offre pas les meilleures garanties d’une exploitation correcte.