Cerf sub-adlute, 4 à 6 ans, Quenza
Si des « cerfs » ont été présents en Corse bien avant l’arrivée des premiers hommes, le cerf actuel Cervus elaphus corsicanus aurait été introduit par l’homme à partir de l’âge du bronze (1200 – 700 av/ J.C.) mais rien ne permet de savoir s’il est issu de la population implantée en Sardaigne ou s’il est venu du continent. Dès 1777, le scientifique Erxleben a fait du cerf corso-sarde une variété, puis une sous-espèce.
Aujourd’hui, le Cerf corso-sarde est reconnu comme étant le plus petit des cerfs élaphes. La différenciation de cette sous-espèce est d’ordre génétique et morphologique. La hauteur au garrot pour les mâles corso-sardes varie de 85 à 110 cm. Pour les femelles elle varie entre 75-90 cm. Le poids moyen d’un mâle est compris entre 100-120 kg et entre 50-85 kg pour les femelles. Le Cerf élaphe européen est bien plus imposant : de 120 à 150 cm au garrot pour les mâles et de 100 à 140 cm pour les femelle pour un poids compris entre 150 et 250 kg pour le cerf et entre 60-120 kg pour les biches. La différenciation entre les deux sous-espèces se fait également par la ramure des bois, notamment au niveau des cors. Le bois du cerf élaphe continental, comprend un surandouiller, généralement absent des bois du Cerf corso-sarde, et une ramification bien inférieure (8-10 cors en moyenne) de celle du voisin continental (12-18 cors). Dernier critère de différenciation, les vocalisations du Cerf corso-sarde sont bien plus graves que celles du Cerf élaphe, d’une fréquence moyenne de 40 Hz avec un pic moyen de 52 Hz. Le cerf continental vocalise avec une fréquence moyenne de l’ordre de 100 Hz. La vie en milieu insulaire a donc entraîné la différentiation de la sous-espèce corso-sarde.
Biche au Monte Rasu, Asinau
Réintroduction et répartition actuelle
En Corse, le Cerf s’est maintenu jusqu’à la fin des années 60 puis a disparu définitivement de l’île en raison d’une fragmentation de son habitat, d’une chasse intensive et d’actes de braconnages. C’est en 1985 que débuta un programme de réintroduction, à partir d’animaux de Sardaigne, puis d’élevage, mené par le PNRC. Depuis, 12 lâchers in natura de 250 cerfs ont été organisés de 1998 à 2014 sur 5 secteurs : Alta Rocca (Quenza), Fium’Orbu (Chisà), Vénacais (San Petru di Venacu), Caccia – Ghjunsani (Moltifau/Castifau) et les Deux Sorru-Dui Sevi (Guagnu et Letia). Au total, le Cerf occupe aujourd’hui environ 45 000 hectares. A partir de différentes campagnes de recensement la population actuelle est estimée à plus de 1 000 animaux. Mais rien n’est pour autant terminé, différents protocoles de suivi sont actuellement réalisés pour étudier de plus près l’acclimatation des animaux et leur état de santé par l’intermédiaire d’un programme LIFE+ Nature.
Cerf sub-adulte, 4 à 6 ans, San Petru di Venacu
Des menaces toujours d’actualité
Les menaces du passé pèsent toujours sur cet animal emblématique puisque, en 2014, deux cerfs ont été abattus. Ces actes mettent en péril des décennies de travail et d’efforts portés à la sauvegarde du Cerf en Corse. Il appartient à tous aujourd’hui de prendre la juste mesure de tels actes et de faire en sorte que cela ne puisse plus jamais se reproduire. De surcroît, l’ouverture du milieu, la fragmentaion de son habitat à des fins d’urbanisation tous azimuts sans prise en considérations de son aire de répartition, représentent actuellement une des principales menaces pour l’espèce.
Le cerf et le mouflon cohabitent en Corse sur le massif de l’Alcudina, en particulier en vallée d’Asinau sans qu’aucune concurrence ne soit observée. Le cerf fait partie de notre patrimoine naturel, culturel et historique ! Contribuer à sa préservation est un devoir qui nous concerne tous !
Jeune cerf, 2,5 à 3 ans
Le statut de protection du Cervus elaphus corsicanus
Le Cerf de Corse est protégé et figure dans différentes directives ou listes telles que :
- la liste rouge des espèces menacées de l’IUCN (International Union for Conservation of Nature) au statut EN : en danger.
- la Directive Habitats-Faune-Flore : Annexe II et IV.
- la convention de Berne : Annexe II
Il a fait récemment l’objet d’une demande de classement dans la liste des mammifères terrestres protégés auprès du ministère de l’écologie, car actuellement son statut de protection est précaire puisqu’il n’est pas considéré en tant que sous-espèce. Il est associé à la liste des espèces gibiers, soumis à un « plan de chasse 0 » reconduit chaque année par arrêtés préfectoraux.
D’autres cervidés en Corse, il y a bien longtemps
Des « cerfs » ont été présents en Corse bien avant l’arrivée des premiers hommes, lorsque le bloc corso-sarde était encore rattaché au sud de la France. La plus ancienne trace de faune mammalienne connue à ce jour est un fragment crânien d’un herbivore proche des cervidés « Pomelomeryx boulangeri ». Ces vestiges ont été découverts dans la région du Vaziu dans des terrains ayant environ 25 millions d’années. D’autres restes fossiles montrent que deux cervidés endémiques ont vécu sur l’île : « Cervus elaphus rossi » proche parent du cerf actuel et « Megaloceros caziotii » (ou cerf de Caziot), parent méditerranéen de petite taille du « Megaloceros giganteus » qui lui, se serait maintenu jusqu’à environ – 8500 ans.