Bastia, tribunal correctionnel, audience du premier décembre 2015. Roger Miniconi, qui dit à la barre être titulaire d’un doctorat d’océanographie mais qui n’en fournit pas la preuve*, est président du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN ) de la Corse. La Cour l’a condamné à huit mois de prison avec sursis, 5 000 € d’amende et à deux ans d’interdiction d’exercer ses fonctions au sein de ce conseil. L’association U Levante, à l’origine de la plainte, n’avait demandé qu’ 1 € de dommages et intérêts, ce qu’il a obtenu, ainsi que 750 € de frais.
Les juges ont retenu la prise illégale d’intérêts.
Les 137 hectares du “Domaine de Chjavari” sont la propriété de deux sociétés “Liberta” et “Du Sud et du Levant”, sociétés présidées par Antoine Lantieri**. Ce domaine est le support d’un projet immobilier pharaonique :
Padduc/ZNIEFF = espace remarquable. Agissez pendant l’enquête publique !
L’enquête et l’audience ont démontré les liens directs et intéressés*** de Roger Miniconi avec ces deux sociétés depuis au moins 2009.
R. Miniconi est président du CSRPN. Le Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel donne des avis sur les classements en ZNIEFF, Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique, Floristique et Faunistique, en sites Natura 2000 et en arrêtés de biotope. Ses avis sont suivis pratiquement à 100 % par la DREAL et l’Institut National du Patrimoine Naturel. R. Miniconi a été nommé au CSRPN en 2004 par arrêté préfectoral, sur proposition de la DREAL.
En Corse, en application du Schéma d’aménagement de la Corse et jusqu’à l’adoption du Padduc en octobre 2015, les znieff bénéficiaient d’une forte présomption d’inconstructibilité. La réalisation d’un projet immobilier situé dans znieff nécessite donc, au préalable, le déclassement de celle-ci.
Le domaine de Chjavari est inclus dans une znieff de type 1.
En 2013, la mairie de Coti Chjavari demande la réduction du périmètre de cette znieff de la forêt de Chjavari : la réduction comporte toutes les parcelles du domaine d’A. Lantieri. Trois votes sont favorables au déclassement mais, fort heureusement, 14 votes sont défavorables. En prenant part au vote (effectué exceptionnellement à bulletins secrets) R. Miniconi a commis le délit de prise illégale d’intérêts. Il ne pouvait avoir à la fois la casquette de membre du Conseil et celle d’acteur rémunéré du domaine.
La Corse a grand besoin de clarté. La moralisation de la vie publique doit être une réalité, en Corse comme ailleurs. Il n’est pas tolérable de hisser à la présidence d’un Conseil, officiellement chargé de la protection de l’environnement, un homme susceptible d’être juge et partie puisque lié à un promoteur de projets immobiliers « bénis » par le maire de la commune. L’administration, responsable des nominations, se doit de ne nommer que des personnes aux compétences scientifiques établies et dont les activités et les revenus sont indépendants de tout groupe de pression.
Faute de quoi la pieuvre continuera à s’installer et à étendre ses tentacules.
* Un doctorat d’océanographie s’obtient dans une faculté des sciences au bout de 7 ans d’études minimum. Selon les recherches effectuées par U Levante, R. Miniconi possède non pas une thèse en océanographie mais un DRU, diplôme de recherche universitaire, qui se déroule en un année et dont voici les références : Miniconi R., 1989. Les poissons et la pêche en Corse. Diplôme de Recherches Universitaires, Univ. Aix-Marseille II, 1-504p.
**Les sociétés : Antoine Lantieri (président), Marc Sulitzer et la SCI Baobab (Cyril et Gérard Achcar) dirigent trois sociétés (Du Sud et du Levant, Liberta, et Plein Soleil). François Rouge et la SAS Holdinvest ont cédé leur part à la SCI Baobab. Ces sociétés sont propriétaires de près de 180 hectares à Coti Chjavari dont ceux du pénitencier. L’achat date de 2007.
*** 57 500 € ont été versés par les sociétés d’A. Lantieri à l’association A Barcella, présidée par R. Miniconi. L’argent était versé régulièrement, tous les quatre mois, officiellement en paiement de six études. Selon l’enquête, deux études comportent 5 pages et deux autres 9 pages, pages de couverture comprises. L’étude botanique du littoral, produite en 2009 si l’on en croit sa couverture, contient des analyses effectuées en 2011 … Le bureau de cette association est constitué de trois autres membres de la très proche famille de R. Miniconi. R. Miniconi a, de surcroît, encaissé directement 10 000€ de la société Liberta.