Conférence de presse du Collectif Terra, 27 octobre à 10 heures
Intervention de U Levante
Terra dénonce le trajet oriental de « La Pénétrante » qui passe SUR les anciens bains de la source thermale « A Caldaniccia » et sur les meilleurs lieux connus de forages, hypothéquant ainsi toute future utilisation curative – eaux utilisées dans les domaines respiratoires et dermatologiques – et géothermique – eaux du réservoir profond à plus de 100 °C constituant ainsi une ressource énergétique importante.
Le projet du tracé de “La pénétrante”
1. HISTORIQUE
1.1. XVIII° siècle, 1791 Plan Terrier
Le long du ruisseau Cavallu Mortu, en rive gauche, juste avant la confluence avec la Gravona, plusieurs moulins (indiquant un certain débit du ruisseau à l’époque…) sont localisés : Favaggiola et Bianco. Sur la rive droite, une source est indiquée : fontaine Favaggiola.
1.2. XIX° siècle
• On ne connait pas la date précise de sa découverte mais l’eau est analysée pour la première fois en 1826 (Professeur Poggiale : eau sulfureuse sodique).
• 1843 Cadastre napoléonien – Les bains de Caldaniccia sont bien dessinés pour la première fois. On y accède à partir d’un chemin non rectiligne à partir de la route de Bastia. Il y a une bâtiment d’accueil (hôtel), puis un chemin menant aux bains de forme circulaire (rotonde) et deux autres petits bâtis annexes.
• 1864-1866, carte d’État major – Sur l’extrait ci-dessous figure l’indication des bains de Caldaniccia. Les moulins y figurent également, et la source de Favaggiola vraisemblablement (point bleu sous le « v » de Cavallo). On accède aux Bains par un chemin rectiligne.
1.3. XX° et XXI° siècles
• 1950 – Le chemin menant aux Bains est bordé de chaque côté d’arbres. Le réseau ferré étant achevé depuis 1894, la voie ferrée est représentée ainsi qu’une gare (station) juste à côté des bains.
• 2019 – La zone industrielle de Baleone est installée. Le bâti de l’« hôtel » est figuré. L’indication «les bains de Caldaniccia» n’est présente que pour indiquer la gare ; les bains eux-mêmes ne sont pas représentés (rond jaune ajouté par l’auteur). En effet, dès 1957, le secteur est abandonné et en friche.
En photographies aériennes, l’évolution du paysage montre une artificialisation importante :
Octobre 2022 :
2. GÉOLOGIE
2.1. Carte géologique : le lieu de l’étude se situe en Corse hercynienne, zone ouest de la Corse.
La carte géologique au 1/50 000 Sarrola Carcopino (2015) permet de situer la Caldaniccia dans son contexte géologique. L’extrait ci-dessous montre qu’elle est localisée dans un compartiment de monzogranite à biotite daté à 293.5±2.8 millions d’années (=Ma). D’autres intrusions granitiques affleurent à proximité : une granodiorite a été datée à 297.7±2.4 Ma et le sommet du Monte San’Angelo est constitué de monzonites quartiziques datés à 339±10 Ma.
Source : Ferrandini et al. 2010
Il est possible de dresser une coupe géologique hypothétique suivant le trait noir figurant sur la carte ci-dessus, entre le point A et le point B, les flèches bleues indiquant les eaux thermales :
2.2 – Les eaux de A Caldaniccia
Les aires d’infiltration des eaux seraient à une altitude de 1 850 m. En 1986, les eaux thermales montrent une absence de Tritium prouvant qu’il n’y a pas de mélange avec les eaux superficielles. Jusqu’en 1986, le réservoir des eaux thermales était donc protégé. Actuellement qu’en est-il ?
Le site de la Caldaniccia se situe à l’intersection de plusieurs fractures et sur des zones à forte anomalie Radon :
3. LA PÉNÉTRANTE EST
Selon le BRGM :
- « Nous avons là un potentiel géothermique », « Les résultats géochimiques soulignent toutefois l’intérêt énergétique du site » (notice carte géologique Ajaccio, 1986),
- « …le site était jugé particulièrement intéressant pour un projet de valorisation » et « Sous couvert de faisabilité, l’eau pourrait sinon servir de chauffage aux constructions alentours » (rapport en partenariat avec l’OEC, 2007),
Hélas, les aménagements routiers en projet (pénétrante Est) vont passer sur le site des bains de la Caldaniccia :
Les lieux d’implantation recommandée par le BRGM en 1986 de deux forages, non réalisés, sont devenus impropres à cette foration. Ils sont totalement artificialisés aujourd’hui. Ce cachetage imperméable de bitume et autres matériaux routiers sur des lieux, déterminés comme potentiellement intéressants pour l’exploitation thermominérale et géothermique à l’époque, fait courir un double risque sur les eaux :
- décalage latéral des émergences,
- modifications des caractéristiques thermominérales.
4. CONCLUSIONS
Absents cartographiquement du Plan Terrier, les bains de Caldanaccia fonctionnent à partir de 1839 (arrêté préfectoral d’exploiter) et jusqu’à 1957 (arrêté de retrait d’exploiter). C’est le département de Corse-du-Sud (et donc la CDC ?) qui en serait propriétaire.
L’eau thermale sort à une température de 30°C environ. La température au niveau du réservoir à été estimée à 115°C. Elle a de nombreuses vertus thérapeutiques dans les domaines respiratoires et dermatologiques.
Les travaux routiers envisagés passent au-dessus du champ de fractures du site et condamnent toute exploitation de ces eaux. Les risques de pollution du réservoir sous-jacent ne sont pas négligeables. Il est regrettable que les données scientifiques établies dès 1986 n’aient pas été utilisées pour positionner giratoire et routes de façon à préserver ce patrimoine naturel. Les forages réalisés avant 1986 n’excèdent pas une soixantaine de mètres. Une ressource géothermique potentielle est à rechercher avec des forages profonds (200 à 400 m), à condition de prendre dès maintenant des mesures de protection du réservoir profond.