Pour faire suite à la « mesure 55 » pétrie de bonnes intentions, décidée en comité interministériel de la mer en 2018[1], des décisions ont été mises en place :
Un arrêté est pris en 2019 qui vise à interdire le mouillage dans les zones d’habitat des espèces végétales marines protégées.[2]Ses dispositions ont un mérite, elles préservent les herbiers de posidonie. Mais elles sont insuffisantes pour atteindre l’objectif annoncé « préserver les habitats marins fragiles », d’une part parce qu’elles s’appuient sur un inventaire des espèces végétales obsolète et d’autre part parce qu’elles ne prennent aucune espèce animale en compte.
Les herbiers de posidonies sont des prairies marines qui s’étendent de 4 à 35 mètres de profondeur. Elles sont surnommées « poumon de la Méditerranée ». Outre qu’elles sont un important puits de carbone, elles servent d’abri, d’habitat et de nurserie pour une multitude d’animaux. Plus de 80 espèces de poissons s’y reproduisent. Les larves et les juvéniles s’y cachent efficacement pour échapper à la prédation d’autres espèces. Une étude (rapport Francour 1991 Univ Nice) a démontré que la destruction ou même la simple perturbation de ce milieu peut réduire leur espérance de vie à 2 ou 3 semaines.
Mais les posidonies ne sont pas les seuls végétaux de grande importance ! Au-delà des 35 mètres de profondeur et jusqu’à 65 mètres environ, zone où il est prévu d’autoriser le mouillage de grosses unités, ce sont les « forêts » à Cystoseires zosteroides (algue brune) où vivent Dentis, Sparidés, Corbs, Mérous, Loups, Chapons etc. qui seront affectées.
Des zones de mouillage et d’équipement légers (ZMEL) sont favorisées. Cette méthode de mouillage avec coffre dit « écologique » consiste à s’amarrer à une structure flottante dite « coffre », elle-même reliée par une chaine à un bloc de béton scellé sur le fond ; cela permet d’éviter l’impact mécanique des ancres détruisant, dévastant, par arrachage et labourage la prairie.
Pour autant ce procédé mérite-t-il le qualificatif d’écologique ? Nous ne le pensons pas et voici quelques bonnes raisons qui fondent notre avis.
Le bruit – Les unités arrimées font fonctionner en permanence leurs moteurs pour alimenter le fonctionnement de leurs équipements et leurs occupants multiplient les allers-retours vers les installations côtières. Ce faisant ils produisent des bruits et des vibrations aux conséquences calamiteuses pour les animaux marins.
Les pollutions – De même, ils polluent l’eau avec des hydrocarbures et leur gaz d’échappement et leurs eaux usées peuvent volontairement ou involontairement s’échapper dans la mer.
Le paysage – Leur présence de préférence dans les plus beaux rivages dénature les lieux.
La pollution lumineuse – Ces navires très éclairés créent une barrière lumineuse néfaste aux oiseaux.
Et plouf, les intentions écologistes des écrits ministériels disparaissent quand leur application pratique se traduit par l’installation de ces ZMEL qui ne respectent pas les obligations légales de la trame verte et bleue.
N’y aurait-il pas quelque chose qui cloche là-dedans ?
Ajoutons que nombre de ces riches et puissants propriétaires de grands yachts ne respectent pas ces dispositions et ne sont pas verbalisés.
U Levante a adressé à toutes les autorités un courrier qui détaille les points simplement énumérés ci-dessus :
[1] « Face à la détérioration importante des habitats marins sensibles, du fait du mouillage des navires de plaisance, l’Etat adapte la réglementation pour favoriser le développement de zones et d’équipements de mouillage plus écologiques préservant les habitats marins fragiles. »
[1] – article 6.1 – Le mouillage des navires ne doit ni porter atteinte à la conservation, ni conduire à la destruction, à l’altération ou à la dégradation d’habitats d’espèces végétales marines protégées.
– article 6.2 – Il est ainsi interdit de mouiller dans une zone correspondant à un habitat d’espèces végétales marines protégées lorsque cette action est susceptible de lui porter atteinte.