Dans cette commune littorale de la côte nord occidentale de la Corse, avec une ouverture à l’urbanisation 4 à 6 fois plus importante que celle strictement nécessaire pour loger la population permanente d’ici à 2026, le grave déséquilibre résidences principales/résidences secondaires, non corrigé, aurait dû déboucher sur un avis défavorable en CTPENAF (Commission Territoriale de la Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers). U Levante a écrit aux autorités* pour le souligner.
Ci-dessous un résumé de l’analyse effectuée par U Levante (diaporama plus complet annexé **).
1 – Ce PLU ne réalise pas l’adéquation légale entre population/logements/foncier disponible
L’estimation communale du taux d’évolution (+ 2,4% par an) de la population permanente jusqu’en 2026, cohérent avec l’historique bien qu’un peu optimiste, permet de prévoir 130 habitants supplémentaires en 2026. A raison de 2 habitants par logement, la commune doit donc envisager la construction de 65 logements supplémentaires.
Or la commune présente :
- un objectif de construction de 260 logements dont une centaine de résidences principales et 195 résidences secondaires soit, au final, un taux de résidences principales de 24 % beaucoup trop déséquilibré et identique au taux actuel,
- un foncier disponible qui pourrait accueillir de 288 à 382 logements soit de 4 à 6 fois plus que les 65 logements nécessaires pour couvrir l’augmentation de la population permanente prévue,
- des prescriptions en matière de mixité sociale trop peu ambitieuses.
L’ouverture à l’urbanisation, beaucoup trop importante, est donc illégale par rapport à la loi Littoral et les zonages AUg1 et AUg2 à Tiuccia et AU au village ne sont pas justifiés. Cette ouverture à l’urbanisation est également illégale par rapport au PADDUC (Livret 4, règlements, p.22) :
« Des extensions de l’urbanisation ne peuvent être inscrites dans les documents d’urbanisme qu’à la condition d’avoir fait la démonstration d’une meilleure optimisation du foncier résiduel urbanisable et de la véritable nécessité de l’ouverture à l’urbanisation de nouveaux espaces, au regard des besoins du territoire.»
2 – Ce PLU ne respecte pas la règle de la constructibilité limitée dans les espaces proches du rivage (EPR)
Selon le rapport de présentation, sur les 368 habitants permanents de la commune, 268 habitent Tiuccia. Le PLU arrêté permet d’y construire entre 254 et 314 logements. Le gisement foncier de la seule zone UCd au centre de Tiuccia, objet d’une OAP (orientation d’aménagement et de programmation), permettrait la construction d’environ 150 logements.
L’ouverture à l’urbanisation à Tiuccia, non compatible avec une « urbanisation limitée » qui doit être la règle dans les EPR, est illégale. L’image du foncier constructible est on ne peut plus parlante :
Ce PLU est également illégal par rapport aux prescriptions du PADDUC, livret 4, règlement, p. 120 et 121 : « Dans les EPR, il n’est accepté qu’une extension limitée de l’urbanisation, qui doit être justifiée et motivée dans le PLU » et « l’extension limitée devra être au service d’une amélioration de la mixité des fonctions urbaines et de l’habitat. L’extension limitée doit notamment répondre à un besoin en habitat permanent. »
3 – Ce PLU ne respecte pas les règles liées aux espaces stratégiques agricoles (ESA)
Le Padduc a cartographié 367 ha d’espaces stratégiques agricoles (ESA). Le PLU précise que la commune en a trouvé 484 dont 328 hectares se superposent aux ESA du PADDUC et 155 hectares ne se superposent pas aux ESA du PADDUC.
Par rapport à la cartographie officielle il manque donc 367 ha – 328 ha = 39 ha d’ESA.
Selon les calculs de U Levante (analyse des couches géographiques : carte N°9 du PADDUC et couches SIG PLU fournies), seulement 15 ha des « nouveaux ESA» trouvés par la commune et non 155 ont les mêmes potentialités que les ESA du PADDUC. Il manque donc encore 39 ha – 15 ha = 24 ha d’ESA. Le PLU ne respecte donc pas la règle de l’inconstructibilité des ESA du Padduc.
Et, puisque les zonages urbains U et AU du PLU, zones AU au village, partie centrale de la zone UCd de Tiuccia, consomment 10,2 ha d’ESA, le principe de compensation préconisé par le Padduc n’est donc pas respecté par le PLU de Casaglione.
De plus, les zonages AUg1 et AUg2 sur Tiuccia consomment des ERPAT (Espaces Ressources pour le Pastoralisme et l’Arboriculture Traditionnelle).
Le PLU de Casaglione ne respecte pas le règlement du Padduc vis-à-vis des espaces stratégiques agricoles.
La MRAe*** (Mission Régionale à l’Autorité environnementale) a souligné ces manquements à la non-constructibilité des ESA :
« La MRAe constate que la commune a fait le choix d’intégrer à l’espace urbanisé les terrains à forte potentialité agricole, car enclavés, dans les zones UC et Ucd situés au sein du secteur de Tiuccia. … Sur le secteur du village : L’enjeu majeur réside principalement dans la préservation de certaines terres agricoles à fortes potentialités. … Les limites des zones As et AU pourraient ainsi être ajustées pour préserver au mieux les anciennes terrasses agricoles attenantes aux vergers. … Malgré le retrait de certaines parcelles dont la vocation agricole est compromise, … L’ouverture à l’urbanisation de la zone AU à l’ouest, originellement à vocation agricole, est quant à elle un héritage du cadre permis par le document en vigueur. En effet, cette zone n’apparaît pas de nature à structurer l’urbanisation périphérique du village comme souhaité par le PADD, alors que la zone UV n’est pas optimisée. Aussi, en l’absence d’autorisation d’urbanisme sur les parcelles en limite nord, il convient d’abaisser la limite de cette zone AU. »
La MRAe a également émis un doute sur l’équivalence des terres offertes en compensation de la consommation d’ESA : « Si la quantification communale des ESA fixée par le PADDUC semble atteignable, leur identification précise mériterait cependant d’être réexaminée au regard des critères du PADDUC. »
4 – Ce PLU ne respecte pas le paysage d’U Castellu
En plus de sa non-continuité avec l’existant et l’absence de justification de son ouverture à l’urbanisation, le zonage AUG1 aura une incidence paysagère forte sur l’environnement du site d’U Castellu contrairement au principe contenu dans le PADD page 7. Fait souligné par la MRAe : « la création de ce secteur ne semble pas indispensable à la réalisation des objectifs du PADD alors que l’impact paysager serait extrêmement fort. La MRAe recommande de maintenir le classement de la zone AUg1 en zone naturelle. »
Les ouvertures à l’urbanisation sur le territoire de la commune de Casaglione sont donc non justifiées. Un avis défavorable s’imposait.
* Lettre aux autorités : ** Analyse de U Levante : diaporama = ***Avis MRAe :